Le fruit de la puanteur est un roman d’anticipation dont l’action se déroule à la fois dans la Chine du XIXe siècle et sur la côte ouest du Canada, dans un futur maintenant très proche. Les deux narratrices, Nu Wa et Miranda, sont distinctes, mais leurs histoires respectives en viennent à fusionner. Un certain flou est maintenu tout au long de l’œuvre : s’agit-il de deux histoires singulières, l’une mythologique et l’autre futuriste ? Les protagonistes correspondent-elles à la même personne et, si oui, s’agit-il d’une créature hybride et capable de métamorphoses, parfois poisson, serpent, fille ou femme ? Une étrange maladie qui se propage dans les rêves vient brouiller les cartes. Au bout du compte, le roman peint un portrait troublant de la Chine industrielle, et un portrait tout aussi troublant d’un futur proche dans lequel le monde est gouverné par de grandes corporations, par le clonage et la bio-ingénierie. Rappelant parfois les œuvres de Virginia Woolf, parfois celles de Timothy Findley, parfois celles de Maxine Hong Kingston, Le fruit de la puanteur est un roman écoféministe, queer et politique qui utilise la science-fiction et les tropes des littératures de genre pour encourager une véritable réflexion sur l’identité — notamment au sein de la diaspora chinoise et de la société canadienne —, ainsi que sur la race, le sexe, le genre, les technologies, la globalisation et le biopouvoir. À l’intersection de la littérature féministe et lesbienne, du cyberpunk, de la science-fiction et du réalisme magique, proposant la revalorisation des mythes de la création du monde ainsi qu’une critique du technocapitalisme, Le fruit de la puanteur pose la question de ce que cela signifie d’être humain sur un territoire meurtri et attaqué par le capitalisme sauvage.